Marine nationale : La mixité jugée insuffisante... Comment faire évoluer la sociologie des officiers ?
Par PC le jeudi 26 septembre 2019, 07:14 - Actualité - Lien permanent
Selon une étude publiée en 2010
par la sociologue Carine Le Page et le statisticien Jérôme Bensoussan, plus de
30% des militaires avaient au moins un membre de leur famille ayant fait une
carrière sous l’uniforme.
« Quelle que soit l’armée, un tiers des militaires a évolué dans un environnement militaire [un des membres de la famille est militaire]. De même, que le militaire soit officier supérieur ou militaire du rang, la proportion de militaires présents dans l’environnement familial ne se distingue pas de manière significative, variant entre 31 % et 39 % d’une catégorie hiérarchique à l’autre », soulignait alors cette étude.
En outre, « le groupe des militaires recrutés en tant que militaires du rang et sous-officiers s’oppose à celui formé par les officiers : dans le premier, les militaires sont essentiellement issus de la classe des cadres moyens et de la classe ouvrière, même si une nette différence distingue les militaires du rang des sous-officiers quant à leur appartenance au milieu ouvrier [47% et 34%] et à celui des cadres moyens [19% et 28%]. En ce qui concerne les officiers, plus de 60% sont enfants de cadres supérieurs [34%] et de cadres moyens [27%] et seulement 14% sont enfants d’ouvriers », indiquait encore ce document.
Cela étant, la question qui se pose est celle de savoir si l’origine sociale a une influence sur la vocation – et donc la détermination – d’un jeune homme ou d’une jeune femme à faire une carrière militaire… En tout cas, pour l’amiral Christophe Prazuck, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM], il serait souhaitable de faire évoluer la sociologie des officiers de marine. C’est en effet ce qu’il a expliqué lors de sa dernière audition à l’Assemblée nationale, au début de ce mois.
« Les ressources humaines sont la question stratégique des dix ans à venir pour la marine. Il faut impérativement élargir les viviers de recrutement. Je recrutais 2.400 jeunes il y a 5 ans et j’en recrute 3.600 aujourd’hui, que je vais chercher là où nous n’allions pas. Je dois changer mes méthodes de recrutement, encourager les services de recrutement à aller voir ailleurs. Il s’agit également de la représentation de la marine qui n’est pas un monde à part mais reflète la société et doit, de ce fait, accroître sa mixité », a en effet affirmé le CEMM.
S’agissant de l’accès à l’École navale, l’amiral Prazuck a rappelé qu’il s’appuie désormais sur la « banque d’épreuves du concours de l’École centrale, précisément afin d’élargir la base de recrutement à des jeunes qui sont a priori étrangers au monde militaire. » Mais cette mesure n’a pas fait évoluer la sociologie des élèves de la « baille » alors qu’elle avait été justement décidée pour cela.
En effet, selon le CEMM, « la part des jeunes ayant préparé l’École navale dans des lycées militaires représente toujours 50 % des élèves, l’autre moitié étant issue de classes préparatoires civiles ». Et d’ajouter : « Le changement de concours avait vocation à faire évoluer cette sociologie mais, finalement, la proportion est restée à peu près identique. » Aussi, a-t-il continué, « c’est plutôt par d’autres formes de recrutement qu’elle est susceptible d’évoluer. »
« Je pense que le brassage sociologique peut être favorisé par les officiers sous contrat [OSC], dont le recrutement n’a fait l’objet d’aucune démarche active pendant longtemps », a ensuite estimé l’amiral Prazuck.
C’est à cette fin que la Marine nationale cherche à reprendre contact avec des jeunes diplômés de l’enseignement supérieur ayant échoué au concours d’entrée de l’École navale et qui se sont réorientés vers une autre voie, « ou qui fait une année de césure dans la Marine comme volontaire. »
« Nous avons allongé le cursus de formation des officiers sous contrat, en y incluant la mission Jeanne d’Arc, autrement dit 6 mois supplémentaires au contact des jeunes officiers de l’École navale », a rappelé le CEMM, pour qui ce « recrutement d’officiers sous contrat répond probablement mieux à certaines attentes de notre jeunesse, qui est toujours un peu inquiète à l’idée de signer un engagement pour 27 ans et est plus encline à signer un contrat de quelques années. » ET d’ajouter : « Nous en attendons une plus grande diversité sociologique, une plus grande variété de compétences ainsi qu’une mixité plus importante. »
La mixité justement. Là aussi, la Marine nationale veut l’encourager. « Je constate que le taux de mixité a augmenté de 0,3 %, ce qui est tout à fait insuffisant pour atteindre les 21 % que je vise en 2030, mais constitue peut-être un frémissement », a indiqué l’amiral Prazuck.
« La marine américaine est d’ailleurs féminisée à plus de 20 %. Certains porte-avions américains comportent 30 % de personnel féminin. Or il n’y a aucun doute quant à la capacité opérationnelle de nos camarades américains, pas plus qu’il n’y en a quant à celle de l’armée de l’air française qui est, elle, féminisée à 22 %. Qu’il s’agisse d’image, d’ouverture, de compétences, je suis certain des bénéfices que nous apportera une mixité élargie », a insisté le CEMM.
Selon le dernier bilan social de la Défense, le taux de féminisation de la Marine nationale est de 14,5% [30.012 hommes et 5.101 femmes]. Dans le détail, sur 4.559 officiers de marine, 510 sont des femmes [soit 11%]. Ce taux est plus élevé parmi les équipages de la flotte [16,5%] et les volontaires [25,7%].
Toujours d’après ce rapport, le taux de réussite au concours d’entrée à l’École navale [recrutement direct d’officiers] est de 2,5% pour les femmes [5 reçues sur les 203 qui se sont présentées] et de 7,7% pour les hommes [71 reçus sur 921].
« Je crois souhaitable de porter une attention particulière aux candidatures féminines à l’École navale, à chaque étape de la sélection. Entre l’admissibilité, l’oral et l’intégration, il y a beaucoup de déperdition. Dès cette année, nous allons tenter de mieux en comprendre les raisons », a ainsi constaté l’amiral Prazuck.
Effectivement, en 2018, sur les 328 candidates inscrites, 203 ont passé le concours. Puis 91 ont été déclarées admissibles et 5 ont donc été finalement définitivement admises.
Mais un autre chiffre n’a pas été commenté par le CEMM : celui des femmes candidates à un recrutement interne d’officiers de marine. En 2018, il n’y en a eu que 7 [contre 100 chez les hommes]. Pour comparer, il y en a eu 53 dans l’armée de l’Air [pour 253 hommes] et 85 dans l’armée de Terre [pour 594 hommes].
Source : Zone Militaire - Photo : defense.gouv.fr
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Commentaires
Depuis quelques années déjà l’armé féminise son personnel terre, mer, air. Je pense que le nombre e plus important se trouve dans la marine très peu dans l’armée de l’air du moins je le pense ?
Comme partout, reste le problème d’acceptation de cette féminisation par certains machos….certains officiers !
En ce qui me concerne, je ne suis pas contre et à mon avis elle continuera à tenir un rôle importante dans le futur comme dans toutes les branches ailleurs.
Je pense que depuis une quarantaine d’années certaines d’entre elles ont fait bonne figure dans les rangs de l’armée française et que beaucoup ceux sont distingués…car il faut le dire ; pour ces femmes ca n’était pas gagné !!!
Dans tous les domaines, elles ont gagné mon estime….que de chemin parcourues….Bravo.
Je pense que pour nos jeunettes ayant un petit, moyens et gros bagage que l’aventure est aguichante.
Mieux prendre la mer, voir de grands espaces, de beaux pays, que de moisir dans quatre murs dans l’attente de la retraite.
Pour faire des généraux féminins à court terme…. Ne mettons pas la charrue avant les bœufs
Comme tout en chacun, hommes-femmes doivent fournir des preuves de capacité technique de terrain et d’aptitude psychologique avant de figurer sur un tableau d’avancement.
Reste les problèmes de discrimination des deux sexes…..si de nos jours les risques paraisse aux yeux de tous faible, ils demeurent…..surtout au sein même de la hiérarchie…..chacun souhaite prendre la place de l’autre !!!
Allons enfants de la parie…..l'armée a besoin de vous…..notre chère ministre Florence Parly, favorise la plus grande mixité……Il vous suffit d’avoir de bons bagages et une superbe condition physique pour accéder aux étoiles……
Une chance pour vous médîmes, mesdemoiselles…..madame la ministre ne veut pas entendre parler de discrimination, elle souhaite donner à toutes les femmes leurs chances…youpi !!!
Et bien profiter de cette aubaine que je considère formidable et qui plus est ; non négligeable.
Je ne sais combien dispose de marins la marine nationale ?
Je dirais en regardant nos trois jolies ambassadrices du pompon rouge, que les effectifs sont plus réjouissants à la vue que ceux d’hier…..je sens de la bousculade dans les rangs !!!
Info retraite militaire
La semaine passée, dans son rapport intitulé « Améliorer la condition militaire : une nécessité stratégique, opérationnelle et humaine », le sénateur Dominique de Legge s’était inquiété des conséquences possibles du nouveau projet de réforme des retraites sur la politique des ressources humaines du ministère des Armées.
« Sa fragilisation serait donc susceptible de mettre ce modèle d’armée, reposant sur des effectifs jeunes, en péril, alors même que le nombre de militaires quittant le service sans droit à pension a d’ores et déjà augmenté ces dernières années. […] Au total, les pensions militaires relèvent davantage d’un système de gestion des ressources humaines, unique dans la fonction publique, et du choix d’un modèle d’armée jeune que d’une pure logique d’assurance-vieillesse », avait en effet affirmé le parlementaire.
Pour rappel, le projet de réforme prévoit de mettre en place un système par point, dans lequel chaque euro cotisé donné les mêmes droits, et d’unifier les 42 caisses de retraite actuellement en place.
Peu après la publication du rapport de M. de Legge, le président Macron a une nouvelle assuré que la singuralité du métier militaire et que les exigences de la politique du ministère des Armées en matière de ressources humaines seraient pris en compte dans ce projet, préparé par Jean-Paul Delevoye, Haut-Commissaire à la réforme des retraites.
« Il est vrai que la condition militaire est un trébuchet dont le déséquilibre peut avoir de lourdes conséquences sur l’efficacité opérationnelle de nos armées, qui en constituent la finalité », a affirmé le chef de l’État dans son discours prononcé à l’Hôtel de Brienne, le 13 juillet.
« C’est pour cela qu’il ne faut pas raisonner en termes de normes administratives ou par comparaisons, de manière technocratique. L’état militaire est un état singulier, et cette singularité nous oblige à tracer un chemin propre, balisé par le statut militaire, qui prévoit une juste compensation aux contraintes, aux sujétions qui s’imposent à vous », a-t-il enchaîné.
« Il n’y a donc pas lieu de transiger avec l’exigence de disponibilité en tout temps et en tout lieu, qui est le corollaire du principe constitutionnel de libre disposition des forces armées. Et il faut sans cesse rappeler que le service des armes est imprévisible, risqué, dangereux, qu’il implique esprit de sacrifice, pouvant aller jusqu’au sacrifice suprême », a ensuite rappelé Emmanuel Macron.
« Alors, je le redis : la singularité du métier militaire et les exigences du modèle d’armée, une armée tournée vers les opérations, seront prises en compte dans les réformes à venir, notamment celle de notre système de retraite. Les pensions militaires relèvent d’abord de la condition militaire et d’un contrat passé entre la nation et ses armées », a assuré le chef de l’Élysée.
Cinq jours plus tard, M. Delevoye a livré ses « préconisations pour un système universel de retraite » [.pdf]. Si les détails restent à préciser, voici ce qu’il propose pour les militaires.
« Le maintien de forces armées opérationnelles comporte un impératif de jeunesse des effectifs militaires. Les retraites des militaires ont par conséquent aujourd’hui des règles spécifiques qui ouvrent des droits à un départ précoce à la retraite, permettant ainsi un renouvellement permanent des effectifs. Ces retraites précoces garantissent également la reconversion professionnelle des militaires avec une absence de restrictions au cumul d’une activité professionnelle et du versement d’une pension de retraite de militaire », explique le Haut-Commissaire.
Aussi, avance-t-il, le « système universel maintiendra ces particularités objectivement justifiées par les missions assignées aux militaires. »
Concrètement, la retraite à jouissance immédiate « sera maintenue dans les conditions actuelles ». Ce qui fait que pour les militaires du rang et les sous-officiers, le « droit à un départ à la retraite continuera d’être ouvert à compter de 17 années de service », ce qui « permettra une liquidation immédiate de la retraite. » Mais, comme actuellement, une décote sera appliquée pour les « départs « intervenant avant d’avoir atteint 19,5 années de service. »
« Pour les officiers, le droit à une retraite immédiate sera maintenu dans les conditions actuelles de durée de service. Concernant les officiers dont la limite d’âge est inférieure à 57 ans, une décote sera appliquée pour tous les départs intervenant avant 29,5 années de service. Pour ceux dont la limite d’âge est comprise entre 57 et 62 ans. Il sera fixé un âge du taux plein correspondant à l’âge moyen de départ constaté pour ces catégories de militaires », propose M. Delevoye.
Enfin, poursuit-il, pour les « les militaires dont la limite d’âge est supérieure à 62 ans, les règles de droit commun s’appliqueront. L’âge du taux plein sera par conséquent celui de l’ensemble
des assurés. »
S’agissant des bonifications relatives aux opérations extérieures, les bénéfices de demi-campagne [18 mois retenus dans la liquidation de la pension pour un an de services militaires effectifs], des campagne simple [2 ans retenus pour un an de services militaires effectifs] et de campagne double [soit 3 ans retenus pour un an de services militaires effectifs, octroyée « pour le service accompli en opérations de guerre »] devraient s’effacer au profit d’un système par points.
« L’engagement des militaires les conduit à accomplir, au nom de la Nation, des missions particulières durant lesquelles leur vie peut être mise en danger. À ce titre, ils bénéficieront de points spécifiques dans des situations qui seront définies en étroite concertation avec le ministère des Armées », précise en effet M. Delevoye.
« Tout comme pour les fonctionnaires occupant des fonctions régaliennes, un objectif de maintien des niveaux globaux actuels de retraite sera poursuivi avec, le cas échéant, un mécanisme de surcotisation de l’employeur », conclut-il.
Hier j’ai regardé des jeunes venant de toute la France pour intégrer l’Ecole des mousses de Brest.
Encadrés pendant un an par des officiers de la Marine, Ils ont décroché leurs diplômes faisant d’eux, filles et garçons, les nouveaux marins de demain.
De nouvelles fonctions les attendent ainsi qu’un bel avenir au sein de cette institution militaire qui fourni plus que des emplois……..une découverte sur le monde.
Une chance à saisir, mieux-çà que faire le traine savate dans les rues et faire chier le monde.
7
Les prouesses de nos pompons-rouge…..La frégate Nivôse, en patrouille dans l’océan Indien, a saisi le 25 septembre deux tonnes et demi de résine de cannabis à bord d’un boutre de trafiquants.
Selon l’état-major…….Un trafic susceptible de soutenir le terrorisme…bravo …..Que nos jeunes mousses fraichement diplômés, prennent exemple sur les anciens.
La mixité dans l’armé ne provoque t’elle pas le bordel, voir des conflits au sein même d’un groupe, d’une section, d’une compagnie voir de l’état major ? ??
Comme le disait un sage, la ‘’fesse’’ est génératrice de conflit et de convoitise…..tous en croque !!!
Maintenant, nous ne somme pas au point de départ, du paradis d’éden…… qui à foutu le bordel dans l’esprit du pauvre Adam et de la bougresse Eve….ils ont croqués….rien de nouveau…….
9
Exact, le cul est source de tous les conflits…..de nos jours encore, le droit de cuissage demeure.
Pour faire la grimpette…au diable l’avarice, faisons des sacrifices…sacrifions-le…..je plaisante bien sur……merde pourquoi je tousse ?
Général (2s) Pierre ZAMMIT
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Quelles politiques de soutien à l’export de défense dans le monde et en France
Quelles politiques de soutien à l’export de défense dans le monde et en France ?
vendredi 27 septembre 2019, par Lucie BERAUD-SUDREAU, Mahault BERNARD
Quelles sont les grandes tendances des exportations d’armement au niveau mondial ? Quel
impact le Brexit pourrait-il avoir sur l’industrie britannique d’armement et la politique de
défense du pays ? Quels sont les enjeux de la création d’une industrie européenne de défense ?
L’enjeu de la création d’une industrie européenne de défense est-il également d’assurer des
ventes d’armes plus responsables sur le plan éthique ? Chercheuse associée à l’International
Institute for Strategic Studies (IISS, Londres), Lucie Béraud-Sudreau répond aux questions de
Mahault Bernard pour Diploweb.com.
Mahault Bernard (M. B.) : Quelles sont les grandes tendances des exportations d’armement au
niveau mondial ? Assistons-nous à un mouvement de réarmement ?
Lucie Béraud-Sudreau (L. B-S.) : Nous assistons à une augmentation des dépenses militaires, un
phénomène qui est lié à la question du réarmement. Cette augmentation est visible depuis 2015. Elle fait
suite à un mouvement de stagnation des dépenses militaires après la crise financière de 2008 et la chute
du cours des prix du pétrole. Aujourd’hui, cette augmentation des dépenses militaires a surtout lieu aux
États-Unis et en Europe. D’une façon générale, certaines tendances de fond ne changent pas dans le
marché mondial de l’armement. En particulier, l’Asie et le Moyen-Orient restent les clients les plus
importants dans le domaine. Cette tendance n’a pas vocation à changer à court terme.
(M. B.) : Puisque l’International Institute for Strategic Studies (IISS) se trouve en Angleterre,
quel impact le Brexit pourrait-il avoir sur l’industrie britannique d’armement et la politique de
défense du pays ?
L. B-S. : Évidemment, l’impact du Brexit sur l’industrie de défense britannique dépendra de la forme qu’il
prend. Avec Boris Johnson à la tête du pays, il est aujourd’hui probable qu’un « no deal » ait lieu. Deux
phénomènes parallèles sont alors envisageables.
Tout d’abord, le Brexit pourrait avoir un impact sur les liens entre l’industrie de défense britannique et les
industries européennes. L’industrie de défense européenne est fragmentée mais des entreprises
multinationales comme MBDA, Thalès ou Airbus existent et ont des liens avec l’industrie anglaise
notamment. Comment ces entreprises vont-elles continuer à opérer de manière fluide ? C’est la question
qui se pose. Il est vrai que la défense est un secteur qui reste une prérogative nationale et se trouve donc
moins susceptible d’être impactée par le Brexit. Cependant, ces entreprises devront tout de même faire
face à des problèmes de circulation des produits, du personnel ou des ingénieurs. La question de la
transmission des informations se pose également. Le Royaume-Uni devra, en effet, conclure un accord
avec l’Union européenne sur les questions de confidentialité et de secret-défense. Si un Brexit dur a
effectivement lieu, des entreprises comme Airbus envisagent de délocaliser certaines activités. Ce
phénomène aura certainement lieu plutôt au niveau commercial mais peut aussi avoir un impact sur la
défense. Par ailleurs, le Fonds européen de la défense va maintenant être mis en place. Quel sera l’accès
des entreprises britanniques à ce fonds ? La nature des liens qui subsisteront entre l’industrie britannique
et les industries européennes voire une hypothétique industrie européenne de défense se trouve donc au
cœur du Brexit.
Ensuite, il est clair que la Grande-Bretagne veut sortir de l’Union européenne tout en créant de nouveaux
partenariats. C’est l’idée de « global Britain ». Dans ce cadre, on observe en 2019 que le département
britannique en charge du soutien à l’export de défense augmente ses activités et essaie de soutenir les
entreprises britanniques du secteur. On peut s’attendre à des efforts décuplés dans ce domaine.
Cependant, il est difficile de déterminer si cette politique aura un effet concret dans le futur. En effet, les
exportations d’armement dépendent d’une demande exogène.
Ainsi, deux mouvements parallèles ont lieu aujourd’hui : une diminution des liens avec l’Union européenne
et une tentative de création de nouveaux liens avec l’extérieur.
(M. B.) : Quels sont les enjeux de la création d’une industrie européenne de défense ?
L. B-S. : Ceci est un sujet à suivre. Il y a eu deux mouvements successifs allant dans le sens d’une
création d’une industrie européenne de défense. Tout d’abord, à la fin des années 1990, après la Guerre
froide, une contraction des marchés de défense a eu lieu. Les Européens, suivant alors les Américains, ont
décidé de consolider leur industrie. Cependant, ce mouvement n’a pas abouti. Les coopérations au niveau
terrestre et maritime sont en particulier encore très éparpillées. Depuis cette période, la Commission
européenne encourage l’intégration dans ce secteur mais les États et les industries nationales campent
encore sur leurs positions et résistent à plus d’intégration. Des enjeux de souveraineté et d’emplois sont,
en effet, mêlés à ces politiques. Une nouvelle contraction des budgets de défense a à nouveau eu lieu suite
à la crise financière de 2008. La question du financement de l’industrie européenne s’est alors posée. Il
s’agissait par ce biais de mettre en commun les ressources afin de résister à cette contraction. Le premier
enjeu de la création de cette industrie est donc économique.
Un mouvement plus politique existe en parallèle. De nouveaux acteurs arrivés à la Commission
européenne comme Jean-Claude Juncker et Federica Mogherini ont encouragé cette politique. Ils ont en
effet vu dans ce mouvement une manière de relancer l’intégration européenne. Ce soutien à la création
d’une industrie de défense européenne vient donc également d’acteurs supranationaux.
Au niveau national, des pays comme la France ont cherché à garantir leur autonomie stratégique ainsi que
leur indépendance face aux Américains ayant de moins en moins d’intérêts stratégiques en Europe. Ils
semblent avoir trouvé une réponse dans la création d’un marché de défense européen.
Ces trois mouvements ont encouragé cette politique. L’enjeu est donc de créer des géants au niveau
européen pour garantir l’indépendance des pays de l’UE dans ce domaine, l’intégration entre ces pays et
résister aux contractions successives du marché. Cependant, les avancées dans le secteur doivent faire
face à ce que l’on pourrait appeler une sorte de « schizophrénie » des États européens. D’une part, ces
États désirent avancer dans l’intégration. D’autre part, ils veulent garantir la souveraineté. Ces deux
mouvements s’affrontent donc aujourd’hui. Des rapprochements existent mais il est trop tôt encore pour
considérer qu’une réelle intégration est faite. Il s’agit dans ce secteur d’une politique de petits pas.
(M. B.) : L’enjeu de la création d’une industrie européenne de défense est-il également
d’assurer des ventes d’armes plus responsables sur le plan éthique ?
L. B-S. : En effet, c’est là un véritable enjeu. Il est essentiel de souligner ce lien entre industrie
européenne et ventes d’armement puisque la raison principale des exportations des pays européens est
que leur marché est trop petit pour soutenir durablement leur industrie. Les exportations permettent de
garantir un niveau de production que la seule demande du marché national n’aurait pas pu couvrir.
Il est donc possible d’imaginer qu’avec un marché européen plus unifié qui leur promet plus de
débouchés, ces pays seraient moins dépendants de leurs clients à l’export hors de l’UE. Il est certain que
si la France acceptait de vendre moins à des pays comme l’Arabie Saoudite, cela faciliterait la création de
ce marché européen, et notamment la coopération avec l’Allemagne. La France ne s’est pas encore
engagée dans cette voie et il semble peu probable que cela arrive prochainement. En effet, le discours
français sur ce sujet, même s’il est très axé sur l’Union européenne, n’a encore que peu évolué.
(M. B.) : Nous parlons donc ici de la dépendance de la France vis-à-vis de ses clients. Cette
politique de soutien à l’export de défense mise en place pour garantir la souveraineté de la
France a-t-elle rendu le pays dépendant de ses exportations d’armement ?
L. B-S. : Ceci est un argument très intéressant mais difficile à prouver autant dans un sens que dans
l’autre. En effet, comment savoir si ces exportations garantissent l’indépendance de la France ? Le pays
est en mesure de surveiller les armes qu’il a vendu et ses clients ne sont pas autorisés à réexporter ces
armes. Cependant, les questions de transfert de technologie ainsi que de respect des normes
internationales par les clients de la France restent problématiques.
(M. B.) : Pourrait-on imaginer l’instauration d’un contrôle parlementaire en France comme en
Suède ?
L. B-S. : C’est une piste qui pourrait être explorée et qui serait intéressante puisqu’elle permettrait
d’avoir un débat au sein du pays. Il est vrai que des discussions apparaissent depuis quelques mois. Le fait
de mettre des parlementaires dans la boucle d’autorisation avant que la licence soit accordée, permettrait
d’ouvrir plus largement le débat au public. Dans le modèle Suédois, les parlementaires ont également un
droit de véto. Il est difficile d’imaginer que cela soit possible en France. Cependant, cette ouverture du
débat doit se faire par étapes, en commençant par l’intégration des parlementaires dans les décisions
d’autorisation des exportations. Il s’agit d’une éducation à faire car les parlementaires s’intéressent
aujourd’hui peu à cette question. L’ouverture du débat en France est évidemment un processus de long
terme qu’il faut voir sur dix ans. C’est un mouvement qui a été amorcé récemment et cela peut être le
début d’un véritable changement. Ce mouvement doit également passer par la mobilisation de la société
civile. Si elles sont mobilisées et écoutées, les ONG pourront avoir un impact sur les parlementaires.
NDLR : Reste à savoir comment des acteurs extérieurs – éventuellement concurrents de la France sur les
marchés d’armement – pourront instrumentaliser notamment via des actions de lobbying les
parlementaires, organisations non gouvernementales, médias et réseaux sociaux pour entraver les
exportations françaises d’armement.
Copyright 2019-Béraud-Sudreau-Bernard/Diploweb.com
P.-S.
Spécialiste de l’industrie de défense et des politiques d’exportations d’armement, Lucie Béraud-Sudreau
est chercheuse associée à l’International Institute for Strategic Studies (IISS) basé à Londres (Royaume-
Uni) où elle est chargée de l’étude de l’économie de défense. Mahault Bernard a suivi en 2018-2019 une
formation à Londres à l’International Peace and Security MA au King’s College London. Elle a assuré
durant cette année universitaire des synthèses de conférences géopolitiques et stratégiques pour le Diploweb.com
Tout de même bizarre…..l’ancien président de la république jacques Chirac à servi sous les drapeaux pendant la guerre d’Algérie et qu’aucune association d’anciens combattants ne lui rende les honneurs, drapeaux en tête !!!
D’autres parts je le comprends, le président de la république actuel redore son blason……il remontera certainement dans les sondages !!!
Par contre les pas de figures cireurs de popes ne manquent pas aux obsèques … !!!
Je salue uniquement l’ancien d’Algérie……pour le reste et bien, je suis complètement dégouté.